12 Juin Garde à vue – Déclarations spontanées
Les déclarations spontanées d’un gardé à vue transféré au commissariat ne peuvent être intégrées dans la procédure
Cass.crim., 25 avril 2017, n°16-87.518
Le Code de procédure pénale a prévu un cadre dans lequel la personne placée en garde à vue peut être entendue et ses déclarations peuvent être retranscrites.
En ce sens, les articles 63-1 et 63-3-1 du Code de procédure pénale prévoient la possibilité pour la personne placée en garde à vue d’être assistée par un avocat et le droit de se taire.
L’article 63-4-2 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui que dans le cas où la personne placée en garde à vue a choisi d’être assistée d’un avocat, celui-ci doit être présent dans le cadre des auditions, hormis les cas où il aurait du retard.
La jurisprudence a précisé que les déclarations spontanées de la personne placée en garde à vue ne pouvaient être recueillies par les enquêteurs lorsqu’elles sont recueillies en dehors de ces cadres légaux.
C’est notamment la solution de la Cour de cassation du 25 avril 2017.
- Arrêt du 25 avril 2017
En l’espèce, la personne gardée à vue avait été déplacée par les enquêteurs en vue d’une perquisition, dans le cadre d’une procédure pour tentative de meurtre, violences aggravées et infraction à la législation sur les armes.
Alors qu’il se trouvait dans un véhicule avec des enquêteurs, en chemin pour rentrer au Commissariat, l’individu expliquait spontanément aux enquêteurs les circonstances dans lesquelles il était entré en possession de l’arme utilisée, et qu’il n’avait pas eu l’intention de tirer et de viser la victime.
Les enquêteurs retranscrivaient ces déclarations dans un procès-verbal.
L’individu était mis en examen des chefs susvisés.
Il déposait une requête en nullité de ce procès-verbal et la Cour d’appel faisait droit à sa requête.
La Cour d’appel jugeait que l’individu avait sollicité l’assistance d’un avocat et n’y avait pas renoncé de manière équivoque.
Il ne pouvait dès lors être entendu que dans le cadre d’une audition, en présence de son avocat.
Par ailleurs, aucune circonstance exceptionnelle ne justifiait que les déclarations ne soient pas recueillies une fois dans le Commissariat, dans le cadre d’une audition.
La Cour de cassation a validé cette argumentation, et rappelait l’importance pour les enquêteurs de respecter le cadre légal prévu, à savoir une audition au cours de laquelle l’individu peut être assisté d’un avocat et faire usage de son droit au silence.
Dans ces conditions, ce procès-verbal pouvait être annulé.
Cette décision était d’autant plus importante que l’individu avait fait des déclarations auto incriminantes dans ce véhicule.
La jurisprudence a eu l’occasion à plusieurs reprises de rappeler ce cadre légal et l’interdiction de recueillir des déclarations spontanées en dehors de toute audition ou interrogatoire.
- D’autres exemples de déclarations spontanées entrainant la nullité des actes
A titre d’exemple, la Cour de cassation a pu casser l’arrêt d’une Cour d’appel qui avait validé le procès-verbal d’enquêteurs ayant recueillis des déclarations spontanées après un interrogatoire de première comparution.
L’individu avait fait usage de son droit au silence lors de cet interrogatoire, puis se livrait aux enquêteurs dans le cadre de son transfert en maison d’arrêt.
Selon la Cour de cassation, les enquêteurs ne pouvaient retranscrire ses déclarations dans un procès-verbal, mais pouvaient uniquement informer le Juge d’instruction de la volonté du mis en examen de s’exprimer (Cass.crim., 5 mars 213, n°12-87.087).
De la même manière, il est acquis par la jurisprudence que la retranscription de déclarations recueillies dans le cadre de la sonorisation des cellules de garde à vue est interdite.
Ainsi, il n’est pas possible pour les enquêteurs d’enregistrer les déclarations spontanées de personnes placées en garde à vue, réalisées en dehors de tout cadre légal, de toute audition, et sans la présence d’un avocat, et de les retranscrire dans un procès-verbal (Cass. AP., 6 mars 2015, n°14-84.339).
Enfin, la retranscription de déclarations spontanées réalisées avant la notification des droits à la personne placée en garde à vue est également interdite et peut faire l’objet d’une annulation.
En l’espèce, au passage d’un enquêteur, un individu lui demandait les motifs de son placement en garde à vue, puis reconnaissait avoir commis les faits reprochés. L’enquêteur retranscrivait sur procès-verbal la teneur des propos tenus. Compte tenu de son état alcoolisé, la notification des droits n’avait pas encore eu lieu.
La Cour de cassation cassait l’arrêt de la Cour d’appel, au motif que les déclarations spontanées réalisées avant toute notification des droits au silence et d’être assisté d’un avocat ne pouvaient être retranscrites (Cass.crim., 5 juin 2019, n°18-83.590).
Dans le cas où des déclarations spontanées seraient réalisées hors présence de l’avocat et en dehors du cadre de l’audition, il conviendrait de solliciter la nullité du procès-verbal retranscrivant ces déclarations.