L’INTERDICTION D’ENTRER EN CONTACT AVEC LA VICTIME

L’INTERDICTION D’ENTRER EN CONTACT AVEC LA VICTIME

(et notamment le bracelet antirapprochement)

 

Sous-titre : Quels sont les contours de cette interdiction et que signifie-t-elle précisément ?

 

  1. Cadre légal

L’interdiction judiciaire d’entrer en contact avec la victime ou potentielle victime d’une infraction peut intervenir à différents stades de la procédure pénale.

Cette interdiction vise à éviter au prévenu ou à l’auteur de l’infraction de faire pression sur la victime, ou de réitérer les faits pour lesquels il a été condamné.

Dans le cadre de l’instruction : le Juge d’instruction ou le Juge des libertés et de la détention peuvent placer le mis en examen sous contrôle judiciaire (Article 138 du Code de procédure pénale) ou sous assignation à domicile sous surveillance électronique (Article 142-5 du Code de procédure pénale) le temps de l’instruction.

Dans le cadre de ces deux mesures, ces magistrats peuvent imposer au mis en examen l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, de quelque façon que ce soit (Article 138-1 du Code de procédure pénale).

Dans l’attente d’un jugement : Le prévenu peut être soumis à un contrôle judiciaire dans l’attente de l’audience de jugement, et être à ce titre soumis à des obligations et des interdictions.

C’est notamment le cas de la convocation par procès-verbal avec placement sous contrôle judiciaire (Article 394 du Code de procédure pénale), décidée par le Procureur de la République.

De la même façon, le prévenu peut être amené à refuser la comparution immédiate et à demander un délai pour préparer sa défense. Dans ces conditions, le Tribunal pourra le placer sous contrôle judiciaire le temps de la prochaine audience (Article 397-3 du Code de procédure pénale).

A la condamnation : le Tribunal peut condamner le prévenu à une peine d’emprisonnement assorti d’un sursis probatoire (ancien sursis avec mise à l’épreuve), c’est-à-dire un sursis dans le cadre duquel il devra respecter des interdictions et obligations.

Dans ce cadre, le juge peut imposer une obligation de « S’abstenir d’entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, et notamment des mineurs, à l’exception, le cas échéant, de ceux désignés par la juridiction » (Article 132-45 du Code pénal).

 

  1. Cas spécifique des violences conjugales

Dans le cas spécifique des violences conjugales, la législation prévoit la possibilité de placer le mis en examen ou le prévenu en attente de jugement sous un dispositif électronique spécifique, à savoir le bracelet anti-rapprochement (Article 138, 17bis, du Code de procédure pénale) :

« 17° bis Respecter l’interdiction de se rapprocher d’une victime de violences commises au sein du couple prévue à l’article 138-3 et contrôlée par un dispositif électronique mobile anti-rapprochement ».

Ce bracelet peut être mis en place dans le cadre d’un contrôle judiciaire (Article 138-3 du Code de procédure pénale).

Cette mesure peut aussi être décidée par la juridiction de jugement, sous la forme d’une peine (Article 132-45, 18bis, du Code pénal).

Selon l’article 132-45-1 du Code pénal, ce dispositif peut être mis en place avec le consentement de la victime et de l’auteur, en cas d’infraction punie d’au moins trois ans d’emprisonnement contre son conjoint, concubin ou partenaire de pacs, ancien ou actuel.

 

  1. Moyen de contact interdits

L’interdiction d’entrer en contact avec la victime est large et vise tout moyen de contact.

Elle s’entend notamment du contact physique. Il est donc interdit à la personne soumise à cette interdiction de rencontrer physiquement la victime.

Mais plus encore, cette interdiction s’étend à la prise de contact par téléphone ou par lettre (Cass.crim., 13 mai 2015, n°14-80.956).

Le fait de passer par un tiers pour prendre contact est également inclus dans cette interdiction, notamment en passant par la voisine (Cass.crim., 13 mai 2015, n°14-80.956).

De plus, il convient de noter que la prise de contact par le biais des réseaux sociaux est également incluse dans cette interdiction (https://lagazette-sqy.fr/2024/02/27/votreville/trappes/un-mari-a-contacte-plus-de-500-fois-sa-femme-alors-que-cela-lui-etait-interdit-par-la-justice/).

Enfin, le fait que la victime prenne elle-même contact avec le prévenu ou le condamné, ou qu’elle manifeste la volonté de faire retirer cette interdiction, ne lève pas l’interdiction de contact pesant sur le prévenu ou le condamné (https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/elle-supplie-le-tribunal-de-ne-pas-maintenir-l-interdiction-de-contacts-avec-son-conjoint-violent-95b25b28-a39c-11ed-a69f-2485525f016c).

 

  1. Risques en cas de non-respect de cette interdiction

En cas de non-respect par le prévenu ou le mis en examen de l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, celui-ci risque la révocation du contrôle judiciaire, c’est-à-dire le retrait de cette mesure.

Dans ce cas, le prévenu ou le mis en examen sera placé en détention provisoire le temps de l’instruction ou dans l’attente de son jugement (Article 141-2 du Code de procédure pénale).

Dans le cadre d’un sursis probatoire, le condamné qui ne respecterait pas l’interdiction d’entrer en contact avec la victime risque la révocation de son sursis probatoire (Article 132-47 du Code pénal).

Cela signifie qu’en cas de nouvelle condamnation, le Juge pourra décider d’appliquer tout ou partie de la peine sous sursis, sur avis du Juge de l’application des peines.

Concrètement, si une personne était condamnée à la peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis probatoire pendant deux ans, et que l’interdiction de rentrer en contact avec la victime est violée, alors le Juge pourra décider d’imposer la peine de 6 mois d’emprisonnement fermes ou moins, en plus de la nouvelle peine liée à la nouvelle infraction.

De plus, le Juge de l’application des peines peut lui aussi, sans intervention d’une nouvelle infraction, révoquer tout ou partie du sursis probatoire en cas de non-respect de cette interdiction.

Il est donc primordial de respecter cette interdiction en toute circonstance, y compris lorsque c’est la victime qui prend contact.