04 Mar NULLITE / Les effets de la nullité des actes de procédure
Les actes de procédure sont l’ensemble des actes réalisés durant l’enquête de police, ou lors de l’instruction. L’idée du législateur, est que la procédure pénale doit être exempt de tout vices, elle doit respecter des règles de fond et de forme ce qui constituent une garantie pour les justiciables. Ces actes font alors l’objet d’un contrôle, pour vérifier s’ils ne sont pas entachés d’une nullité. Ce contrôle peut être effectuer par la Chambre de l’instruction.
La théorie des nullités visent à inciter les divers agents de la procédure à un meilleur respect des règles. L’article préliminaire du Code de procédure pénal dispose en effet :
« La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties […] »
Nous allons essayer de savoir quels sont les effets de la nullité d’un acte de procédure.
I/ Le principe : la suppression des actes de procédure nuls
En vertu de l’article 174 du code de procédure pénal :
« […] La chambre de l’instruction décide si l’annulation doit être limitée à tout ou partie des actes ou pièces de la procédure viciée ou s’étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure et procède comme il est dit au troisième alinéa de l’article 206.
Les actes ou pièces annulés sont retirés du dossier d’information et classés au greffe de la cour d’appel. Les actes ou pièces de la procédure partiellement annulés sont cancellés après qu’a été établie une copie certifiée conforme à l’original, qui est classée au greffe de la cour d’appel. Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties, à peine de poursuites disciplinaires pour les avocats et les magistrats. »
Cet article nous indique que lorsqu’un acte ou une pièce de la procédure est frappé de nullité, ces derniers sont retirés du dossier. S’il y a annulation seulement partielle de l’acte ou de la pièce, la partie concernée est barrer.
Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties.
L’annulation d’un acte ou d’une pièce peut s’étendre à d’autres actes ou pièce, lorsque l’acte qui est annulé n’est pas le support nécessaire des actes ultérieurs.
II/ L’exception : la possibilité de se fonder sur un acte annuler
Cependant, un arrêt de la Chambre criminelle est venu troubler l’utilisation de l’article 174.
Cass. Crim., 19 octobre 2021, n°20-82.172
Un journaliste effectuait une enquête sur la possible corruption d’un haut fonctionnaire, par ces révélations le Procureur de la République, prend un réquisitoire et demande à l’opérateur téléphonique d’obtenir la liste des appels téléphoniques du journaliste. Cela a permis de découvrir la personne susceptible d’avoir corrompu le fonctionnaire de police.
Le mis en examen pour corruption a été soumis au contrôle de la Chambre de l’instruction visant à l’annulation des réquisitions téléphonique. La Chambre de l’instruction a fait droit à la demande par un arrêt du 24 février 2012.
Le journaliste ayant vent de cette affaire porte plainte et se constitue partie civile du chef de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite.
Le juge d’instruction a prononcé un non-lieu, mais le journaliste décide de faire appel de cette ordonnance devant la Chambre de l’instruction.
Dans son arrêt du 29 novembre 2019, la Chambre de l’instruction confirme l’ordonnance de non-lieu, en se fondant sur l’article 174, en considérant que l’appel repose sur des réquisitions qui ont été annulées. Ce qui signifie qu’ils n’ont plus d’existence et ne peuvent donner lieu à des poursuites pour le délit de collecte de données à caractère personnel.
Le requérant forme alors un pourvoi en cassation.
La chambre criminelle ne va pas aller dans le sens de la chambre de l’instruction et casse et annule l’arrêt rendu le 29 novembre 20219. La Cour de cassation a jugé qu’il est possible de se fonder sur des actes annulés, en se fondant sur l’article 6-1 du code de procédure pénale.
Le principe de l’article 174, s’est de considérer que lorsqu’un acte de procédure est annulé, on le reitre du dossier, ce qui signifie qu’il n’existe plus aux yeux de la justice. Le dernier alinéa de cet article dispose que la pièce annulée ne peut pas être utiliser contre le bénéficiaire de cette nullité.
Néanmoins cet article doit s’articuler avec l’article 6-1 du code de procédure pénale qui prévoit la possibilité d’exercer des poursuites dans une procédure future sur une infraction qui implique la violation d’une règle de procédure à condition que le caractère illégal a été constaté par une décision définitive.
En l’espèce, le journaliste soulève le délit de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite, en se fondant sur le réquisitoire annulé par la chambre de l’instruction. L’annulation de ce réquisitoire, lui a bénéficié autant qu’au requérant. Sa constitution de partie civile était possible, puisqu’elle ne portait pas atteinte aux droits du requérant à la nullité et qu’il s’agit d’une procédure distincte.
On peut en conclure que L’utilisation d’une pièce annulée dans une procédure subséquente est possible lorsque cela ne porte pas atteinte aux droits du requérant à la nullité ayant bénéficié de l’annulation d’actes dès lors, l’interdiction découlant de l’article 174 du code de procédure pénale de tirer des actes annulés ne peut lui être opposée.