PROCEDURE PENALE / L’ARTICLE 77-2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET LE DEBAT CONTRADICTOIRE AU STADE DE L’ENQUETE PRELIMINAIRE

PROCEDURE PENALE / L’ARTICLE 77-2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET LE DEBAT CONTRADICTOIRE AU STADE DE L’ENQUETE PRELIMINAIRE

Quelles possibilités sont offertes aux suspects en cas d’enquête préliminaire qui dure depuis au moins une année ?

 

L’enquête préliminaire, prévue par les articles 75 et suivants du Code de procédure pénale, est le mode d’enquête le plus courant.

Dans ce cadre, le Procureur de la République ordonne aux enquêteurs de procéder à tous les actes qu’il juge nécessaire à la manifestation de la vérité.

Cependant, ce cadre n’est pas limité dans le temps, en conséquence les enquêtes préliminaires peuvent s’éterniser, sans que les suspects ne puissent voir leur situation clarifiée.

Or, les droits de la défense à ce stade de l’enquête étaient inexistants, de sorte que les suspects ne pouvaient qu’attendre la décision du Procureur de la République sur les suites données à la procédure.

L’article 77-2 du Code de procédure pénale, modifié par la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021, est venu apporter des solutions à cette problématique et a étoffé les droits de la défense dans ce cadre d’enquête.

 

  1. Droit à obtenir une copie de la procédure, sous réserves que le Procureur en décide ainsi, et à formuler des observations

Cet article prévoit que les avocats et les parties à la procédure, à savoir les suspects et les plaignants pourront avoir accès au dossier pénal, en tout ou partie, sous réserves que le Procureur de la République en décide ainsi.

Puis, ils pourront formuler des observations, notamment sur :

« la régularité de la procédure, sur la qualification des faits pouvant être retenue, sur le caractère éventuellement insuffisant de l’enquête, sur la nécessité de procéder à de nouveaux actes qui seraient nécessaires à la manifestation de la vérité et sur les modalités d’engagement éventuel des poursuites ou le recours éventuel à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ».

 

  1. Droit à demander une copie de la procédure et formuler des observations passé une année

L’article 77-2 prévoit que le suspect encourant une peine privative de liberté peut demander au Procureur de la République d’avoir accès au dossier pénal afin de formuler des observations.

Cette solution est conditionnée par des délais ou une atteinte à la présomption d’innocence :

« 1° Si la personne a été interrogée dans le cadre d’une audition libre ou d’une garde à vue qui s’est tenue il y a plus d’un an ;

2° S’il a été procédé à une perquisition chez la personne il y a plus d’un an ;

3° S’il a été porté atteinte à la présomption d’innocence de la personne par un moyen de communication au public. Le présent 3° n’est pas applicable lorsque les révélations émanent de la personne elle-même ou de son avocat, directement ou indirectement, ou que l’enquête porte sur des faits relevant des articles 706-73 ou 706-73-1 ou relevant de la compétence du procureur de la République antiterroriste ».

Dès lors que l’une de ces conditions est remplie, cette demande peut être réalisée par déclaration au greffe ou par lettre recommandée avec avis de réception.

On comprend qu’il s’agit là d’offrir à un suspect l’opportunité d’accélérer l’issue d’une enquête préliminaire qui durerait depuis longtemps.

Durant un délai d’un mois à compter de la réception de cette demande, le Procureur de la République ne peut prendre de décision sur la poursuite des faits, hormis :

-l’ouverture d’une information,

-le renvoi en comparution immédiate,

-le renvoi en comparution différée,

-la convocation devant le Tribunal correctionnel par procès-verbal,

-la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Les observations ainsi formulées sont versées au dossier pénal et le Procureur de la République apprécie les suites à y donner.

Il convient de noter que le silence vaut décision de refus de communiquer la procédure, décision qui peut être remise en cause devant le Procureur général près la Cour d’appel.

Le Procureur de la République peut refuser la communication de cette procédure, par une décision motivée et pour une durée maximum de six mois, si l’enquête est toujours en cours ou en cas de risque d’atteinte à l’efficacité des investigations.

 

  1. L’impossibilité de poursuivre l’enquête préliminaire au-delà de deux ans après l’un des actes évoqués sans proposition d’accéder au dossier

L’article 77-2 du Code de procédure pénale prévoit enfin que l’enquête pénale ouverte depuis plusieurs années ne peut se poursuivre sans que l’accès au dossier pénal ne soit proposé aux suspects et aux plaignants.

En effet, dès lors qu’un délai de deux ans s’est écoulé après la garde à vue du suspect, son audition, ou la perquisition de son domicile, le Procureur doit proposer aux parties d’accéder au dossier afin qu’elles puissent formuler des observations.

 

On comprend dès lors que l’objectif de cet article est d’éviter les enquêtes préliminaires qui s’éternisent, laissant les suspects comme les plaignants dans l’ignorance durant plusieurs années.