Recel successoral

Recel successoral

Le recel successoral est une fraude commise par un héritier cherchant à rompre l’égalité du partage en dissimulant ou détournant des biens de la succession, ou en cachant l’existence d’un cohéritier.

 

Pour établir l’existence d’un recel successoral, deux éléments doivent être réunis :

Un élément matériel : un acte ou un procédé commis par un héritier ayant pour effet de rompre l’égalité dans le partage successoral. Un élément intentionnel : la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse de l’auteur de l’acte, agissant dans le but déterminé de rompre cette égalité. La preuve de ces éléments incombe à la partie qui invoque l’existence de manœuvres frauduleuses. La preuve de l’élément intentionnel est souvent la plus difficile à rapporter, car elle implique de sonder la volonté de son auteur.

Moyens de preuve de l’élément intentionnel du recel successoral :

La preuve de l’élément intentionnel peut se faire par tous moyens, y compris par témoins et présomptions. En pratique, il est utile de multiplier les éléments de preuve concordants pour forger la conviction du juge, tels que :

Des attestations de témoins démontrant que le receleur avait connaissance de la fragilité du défunt et en a usé pour s’avantager au détriment des autres héritiers. La copie des relevés bancaires du défunt sur les dix années précédant son décès, illustrant l’ampleur des sommes tirées sur ses comptes bancaires, dont a bénéficié le receleur. La copie éventuelle des chèques dont a bénéficié le receleur. Les justificatifs des revenus du défunt au moment de la réalisation de ces dons manuels, illustrant l’importance de ceux-ci, les rendant incompatibles avec la définition du simple présent d’usage. La copie du dossier médical du défunt, illustrant une baisse de ses facultés cognitives précisément à la période où le receleur a commencé à être avantagé par rapport aux autres héritiers. Les pièces d’une enquête pénale souvent diligentée à la suite d’une plainte pour abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse du défunt, comportant des PV d’auditions, des relevés de comptes bancaires obtenus sur réquisition des organismes bancaires. Les pièces du dossier du juge des tutelles si le défunt faisait l’objet d’une mesure de protection avant son décès (habilitation familiale, curatelle/tutelle…).

Cas dans lesquels l’élément intentionnel du recel successoral a été admis :

Une multitude de comportements peuvent caractériser l’existence d’un recel successoral. Ainsi, le recel a notamment été reconnu dans les cas suivants :

La dissimulation d’un héritier. La production d’un faux testament. La dissimulation d’une libéralité ou de dons manuels autrefois accordés par le défunt. La réticence d’un héritier donataire à fournir les renseignements demandés par le notaire et les autres héritiers. La cession à vil prix de parts de sociétés. La non-révélation d’une donation déguisée sous forme d’une acquisition immobilière réalisée par le donataire et financée en réalité par le défunt.

Sanctions du recel successoral :

L’héritier reconnu coupable de recel successoral encourt plusieurs sanctions cumulatives, notamment :

La déchéance de l’option successorale : l’héritier sera alors réputé accepter purement et simplement la succession. Il devra ainsi assumer les dettes successorales, si besoin, sur son patrimoine personnel. Si le recel porte sur une donation rapportable ou réductible, ce rapport ou cette réduction doit être fait et l’héritier ne pourra y prétendre à aucune part. Il n’aura droit à aucune part dans les biens ou droits recelés, qui seront retirés de l’actif successoral et partagés entre les autres héritiers. L’héritier coupable de recel doit restituer tous les fruits et revenus issus des biens recelés, depuis l’ouverture de la succession ; il devra également rapporter les intérêts de la somme détournée, ou les fruits du bien soustrait.

Jurisprudence pertinente :

Un arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation, du 12 juin 2014, pourvoi n°13-17.074, a précisé qu’il importe peu que la fraude aux droits des cohéritiers ait été commise de concert avec le défunt ou même organisée par celui-ci.

Un autre arrêt de la Cour de Cassation du 27 mars 2019, n°18-13.141, a également reconnu le recel successoral dans un cas où un héritier avait volontairement omis de déclarer une donation importante faite par le défunt, privant ainsi les autres héritiers de leurs droits légitimes.

 

En conclusion, la preuve de l’élément intentionnel du recel successoral repose sur la réunion d’indices concordants démontrant la volonté frauduleuse de l’héritier. L’assistance d’un avocat est essentielle pour collecter et constituer les éléments de preuve nécessaires à la reconnaissance du recel successoral et à l’application des sanctions appropriées.